INTERVENTION AU CONSEIL MUNICIPAL DE ROUBAIX DE 18 DECEMBRE 2008 A PROPOS DE LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
Il nous est donc proposé 2 délibérations, une délibération dite cadre qui a pour ambition de définir un plan d’ensemble cohérent pour la démocratie participative et une délibération définissant le nouveau règlement intérieur des conseils de quartier, qui est en quelque sorte la 1ère délibération d’application.
Et nous avons aussi les premières traductions financières qui se nichent dans le programme « Politique de la Ville » 2009 et la traditionnelle délibération d’avances de subvention.
Ce qui n’est bien sûr pas innocent, car si une municipalité n’a de toute façon pas le pouvoir de dissoudre une association, ce qui relativise bien des dénégations, elle peut accorder ou pas des subventions et sous des conditions plus ou moins contraignantes.
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de suspendre le vote de ces délibérations
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et que le conseil municipal se réunisse en séance privée pour auditionner l’ensemble des Comités de Quartier et l’Association Inter Quartiers (AIR).
Pourquoi ?
D’abord, pourquoi les Comités de Quartier et l’AIR ?
Parce qu’ils ont été définis comme acteurs privilégiés et primordiaux par la charte de 1999 qui est le dispositif en vigueur. Si on considère qu’ils ont failli et que le dispositif est obsolète - c’est le fil conducteur de ces textes - la moindre des choses, en terme de respect mais aussi en terme de méthode, serait d’abord que ceux qui avaient été définis comme primordiaux soient entendus.
Pourquoi une séance privée du conseil municipal et une séance privée n’est pas forcément une séance clandestine ?
Parce que cette méthode unirait la solennité d’une démarche et l’égalité des conseillers municipaux dans l’accès aux informations et aux arguments, et par ailleurs, cela ne devrait pas poser de problème majeur puisque votre majorité a déjà proposé des séances de ce type dans les quartiers.
Pourquoi reprendre les choses ?
Parce que le paquet cadeau qui est proposé forme un ensemble disparate et plein de contradictions, parfois très précis, parfois très vagues, avec des effets d’annonce.
On retiendra à ce sujet le projet de conseil de développement local censé être le pivot des dispositifs au niveau de la ville et qui sera chargé d’une nouvelle charte (!). Ce qui soulève d’ailleurs une belle contradiction : on dénonce un empilement brouillon et on en rajoute une couche.
Parce qu’il y a eu une grande inégalité dans les consultations et que manifestement certains débats ont été tronqués, faute que les acteurs aient eu connaissance de l’architecture globale.
Et parce qu’une analyse aussi attentive que possible de cet ensemble imparfait fait apparaître un certain nombre d’éléments concordants, inquiétants parce qu’ils font rupture avec ce qu’on entend par démocratie participative à Roubaix.
Cette rupture est d’ailleurs clairement revendiquée avec l’abrogation de la charte de 1999.
Le principal point de rupture va dans le sens d’une municipalisation de la démocratie de proximité.
La ville reprend la main sur les dispositifs « Ecrivains Publics » et « Fonds de Participation des Habitants » en les recentrant tous les deux sur les Conseils de Quartier.
La charte de 1999 disait que la ville reconnaissait les Comités de Quartier comme des associations autonomes et l’AIR comme fédérateur privilégié de ces associations.
On ne retrouve rien d’équivalent en matière d’autonomie associative mais, si on se garde bien de proclamer la suppression des Comités de Quartier, on leur assigne missions et méthodes obligatoires.
L’AIR n’est plus reconnu comme instance de coordination.
L’activité des Comités de Quartier, leur énergie, leurs moyens sont canalisés de façon impérative vers les Conseils de Quartier et on les déconnecte de la dimension ville que leur donnait leur lieu fédératif, l’AIR.
Le choix des Comités de Quartier sera soit de disparaître, soit de se transformer en sections supplétives des Conseils de Quartier, en exécutants de commandes municipales, ils n’auront plus les moyens de leur autonomie.
Je voudrais revenir sur un constat qui motive cette rupture : la faible participation aux dernières élections municipales.
Il y a une phrase que je trouve merveilleuse :
« Sans vouloir analyser les raisons de cette situation, la politique municipale de développement de la citoyenneté ne peut manquer de ré interroger les instances de participation historiques afin de les rendre plus efficaces face à cette abstention massive. »
En clair, on ne veut pas savoir, on ne veut pas comprendre, puisqu’on ne veut pas analyser, mais on connaît quand même les responsables et on leur donne une injonction d’efficacité.
Plus sérieusement, le phénomène de l’abstention politique est complexe et il interpelle quand même en priorité les partis et leurs candidats sur leur capacité à mobiliser les citoyens sur l’utilité qu’il y a à voter.
Il est le reflet de l’intérêt que les citoyens portent à ceux qui sollicitent leur suffrage et toute injonction au participer pour participer n’y pourra rien.
Il y a là une façon de se défausser de ses responsabilités politiques qui est scandaleuse, et une erreur de diagnostic inquiétante pour l’efficacité des remèdes.
Et je voudrai enfin revenir sur le sort promis à l’AIR.
L’AIR est le lieu de la fédération volontaire des Comités de Quartier, un lieu de respiration ville que les Comités de Quartier ont réussi à faire vivre, justement à l’encontre d’une logique d’enfermement quartier et aussi dans une logique d’autonomie associative.
Sa mort annoncée serait un très un mauvais symbole, et un très mauvais présage de ce qui attends les associations roubaisiennes, en particulier celles qui ont des ambitions fédératives, dans ce futur conseil de développement local.
La démocratie souffre à Roubaix, elle souffre dans les urnes, elle souffre, parfois, dans ce conseil, elle souffre avec ces propositions, c’est pourtant notre bien le plus précieux face à un avenir qui s’annonce difficile.
C’est pourquoi il nous paraît important que la réflexion soit réouverte, c’est pourquoi nous vous demandons de suspendre ces délibérations et de convoquer un conseil municipal pour auditionner les Comités de Quartier et l’AIR, c’est pourquoi nous demandons un vote sur ces 2 propositions.
Christian CARLIER
18 décembre 2008
Le dispositif des 5 Conseils de Quartier qui est un dispositif avec sa légitimité, mais qui est communal avec un poids des élus et des services, est affirmé avec une grande force comme axe central.