Conseil Municipal du 24 juin 2010
Monsieur le Maire,
L’ouverture des commerces le dimanche revient donc au conseil pour un 3ème acte.
Je pourrai reprendre tous les arguments de principe contre le développement de ces ouvertures : inefficace sur le plan économique, dangereux pour les salariés, néfaste pour la vie sociale. Cela a déjà été dit, par beaucoup.
Je vais ce soir plutôt m’attarder sur les détails de cette tragi comédie roubaisienne.
Il est d’abord nécessaire de planter quelques éléments du décor.
D’abord le droit.
Il y a maintenant à Roubaix 3 procédures régissant l’ouverture des commerces le dimanche.
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Les 5 dimanche du maire.
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La dérogation ponctuelle du préfet.
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La dérogation accordée par le préfet dans les périmètres d’usage de consommation exceptionnelle dit PUCE, tels qu’ils ont été définis par l’arrêté du 1er février sur demande de la majorité de ce conseil en novembre 2009, et contre l’avis du conseil de LMCU du 11 décembre 2009.
Dans ce dernier cadre , le préfet accorde aux boutiques une dérogation pour 5 ans, ce qui est considérable et justifie donc un certain nombre de conditions.
Le commerce doit produire un accord écrit des salariés volontaires, un accord collectif ou un référendum approuvant la décision unilatérale de l’employeur. Cela justifie également par ailleurs les contreparties pour les salariés.
La loi donne donc aux salariés un théorique droit de veto.
Ensuite, l’économie.
Il est communément admis que le nombre de dimanche intéressant pour le chiffre d’affaires est limité : un noyau dur de 5, 2 pour les soldes de janvier, 2 pour celles de juillet et 1 pour les Cavalcades de fin août, plus, disons de 1 à 3 selon les années, à intérêt moindre.
Après, les constats sont connus : le pouvoir d’achat n’est pas extensible à l’infini, c’est au mieux un transfert d’activité de la semaine sur le dimanche, le visiteur du dimanche est plus un promeneur qu’un acheteur.
Alors, le décor une fois planté, où en est on ?
Bonne question, excellente question même, dont je n’imaginais pas toute la pertinence au moment où je préparais ces quelques mots.
Figurez vous que le projet de convention qui avait été donné avec l’ordre du jour du conseil indiquait que les boutiques avaient utilisé les 5 dimanches du maire le 1er semestre et que la convention modifiée que nous découvrons ce soir sur table nous dit qu’il n’en est rien.
D’où d’abord une interrogation : sur quelle base juridique les commerces ont-ils été ouverts le 1er semestre ?
Et ensuite un constat : cela semble bien confirmer l’hypothèse dont j’allais vous faire part, à savoir qu’il est bien possible que des boutiques ne puissent ouvrir pour les soldes de juillet faute d’arrêté préfectoral.
En effet, les commerces ont fait leur demande au préfet.
Les salariés ont fait preuve eux, d’un manque d’enthousiasme certain, c’est un euphémisme.
La perspective d’un nombre supplémentaire d’ouvertures le dimanche signifie dégradation de leur vie familiale et pour quel intérêt ? Le précédent de boutiques fermant à 17 h faute de client et faisant un chiffre d’affaire ridicule inquiète même pour la pérennité des boutiques et des emplois.
Il se dit que des dossiers ont été renvoyés par le préfet.
Il se dit aussi que dans un centre, les salariés qui n’ont pas signé sont convoqués individuellement par la direction du centre. Direction qui entre parenthèses se substitue ainsi à l’employeur légal.
On imagine l’ambiance.
On est dans ce dossier à un niveau d’à peu prés qui devient sidérant.
Alors vous nous renvoyez à votre convention, arrachée de haute lutte par une négociation que l’on suppose féroce pour limiter les ouvertures à 10, ce qui est à peu de chose prés l’existant.
Je ne discuterai pas de sa force juridique réelle mais je remarquerai que vous ne faites ainsi que souligner toute l’étrangeté de cette histoire.
Pourquoi en effet mettre en place une procédure aussi contraignante et lourde de conséquences possible pour obtenir un résultat qui était atteint avec les procédures existantes ?
Dit autrement, pourquoi tout ce cinéma si cela ne change rien ?
La première hypothèse est que vous vous êtes précipitamment enferré dans un truc dont vous avez maintenant le plus grand mal à vous dépêtrer. Vous êtes, il est vrai, assez coutumier du fait.
La seconde est qu’il s’agit d’une stratégie sur le moyen terme, tenter de créer une demande par l’offre. C’est une stratégie commerciale bien connue.
Bref que toutes ces déclarations et ces conventions qui se veulent rassurantes ne sont là que pour cacher un premier pas vers un développement ultérieur.
Cela traduirait bien évidemment un projet de société qui n’est pas le notre, nous n’acceptons pas une telle marchandisation du temps libre.
Et cela ne peut manquer de susciter une petite inquiétude sur la situation économique réelle de ces centres qui semblent maintenant prêts à des subterfuges incluant des risques immédiats pour des résultats bien aléatoires à terme.
Nous voterons contre ces 2 délibérations.
Christian CARLIER
24 juin 2010