![«Je suis née et je vis toujours à Roubaix. Du coup, quand j'en parle je n'ai pas le sentiment d'être illégitime», dit Majdouline Sbaï. :](http://www.roubaix.maville.com/photos/2010/01/08/ne_1159235_px_501__w_nordeclair_.jpg)
Elle est la tête de liste des Verts du Nord pour les prochaines Régionales. Plus habituée aux associations qu'aux institutions, cette jeune trentenaire devra mener campagne.DELPHINE TONNERRE > delphine.tonnerre@nordeclair.fr
On l'a vue souvent à l'Université Populaire et Citoyenne. Elle a longtemps oeuvré chez les scouts musulmans. Elle fut aussi animatrice à Radio Pastel.
Aussi a-t-on voulu en savoir un peu plus sur Majdouline Sbaï, 32 ans, tête de liste des Verts aux prochaines régionales pour le Nord. Une première place presque inattendue pour cette militante de longue date, certes, mais qui n'a jamais été élue.
Pas de voiture, pas de télé : c'est une écolo convaincue, « mais pas intégriste », précise-t-elle dans un sourire. Seul le téléphone portable lui est indispensable. Plus quelques romans à dévorer et des kilomètres à parcourir, en course à pied ou en randonnée.
« Je suis née à Roubaix, j'habitais avec mes parents et mes deux frères dans le quartier de Carihem. », explique-t-elle. Une enfance et une jeunesse dans une famille « classique, ouvrière, de gauche, qui n'a pas été épargnée par la crise. On se rend compte très tôt en vivant à Roubaix des réalités. On vit dans une région qui a puisé et épuisé ses ressources, et exploité l'humain, les deux vont souvent ensemble... ».
Bonne élève, elle découvre les textes de Bourdieu et la sociologie au lycée Van der Meersch, « une révélation » dit-elle. L'année où elle obtient son bac, « nous n'étions que 8 élèves sur 38 à l'avoir, ça fixe un peu les choses... ». Majdouline Sbaï ne renonce pas : « J'ai eu très vite envie de dépasser ma condition. Je me suis rapidement forgé une conscience politique ». Elle s'inscrit en fac de sociologie, conformément à sa première passion, puis elle poursuit avec l'IEP (Sciences politiques) de Lille. Parallèlement, elle s'engage dans l'éducation populaire. « Avec les scouts musulmans, on organisait des séjours de plein air avec les enfants. Pour moi, c'était naturel, d'avoir des convictions, et en même temps, concrètement de m'occuper des gamins de mon quartier ».
Sur le plan politique, elle prend sa carte chez les Verts dès 2001. Ça aurait pu être ailleurs, ses frères seraient plus sensibles au discours de Besancenot. Pour elle, c'est une évidence locale : « J'ai connu Slimane Tir à Pastel FM. Les Verts, je les croisais tout le temps à la Maison des associations. » Chez les Verts, on a fait plus vite plus de place aux personnes issues de l'immigration.
Mais on sent que cette question l'agace un peu sur sa place aujourd'hui : « En fait le mieux serait qu'on ne se pose plus la question. Je ne veux pas être tête de liste "parce que" je suis une femme, ou "parce que" je suis issue de l'immigration ».
Professionnellement, elle a passé deux ans au CRIJ, puis un an comme chargée de mission à la préfecture de Picardie. Des expériences qui l'ont confortée dans son idée : « La politique de la ville sert à colmater, sans ambition réelle. Chacun travaille dans sa thématique : emploi, logement, urbanisme, sans vision d'ensemble. » Pour elle, il faudrait s'attaquer au chômage des jeunes. C'était l'objet de la dernière rencontre dde l'UPC avec Martin Hirsch à Roubaix. Un énième constat sur la désespérante situation de Roubaix ? « On réclame un vrai Grenelle de l'insertion à partir de l'expertise qu'on a dressée ». Elle se dit à la fois « optimiste » car elle est persuadée que « c'est possible » . Mais lucide : « Les marges de manoeuvre sont faibles. Je reste une inquiète de nature ».
Le chantier est immense... « mais possible, ajoute-t-elle, on peut arriver à une vraie transformation sociale et environnementale de notre société si on s'en donne les moyens ».
Elle y croit d'autant plus depuis qu'Europe écologie a émergé. Une force politique qui rassemble des Verts, des représentants de la société civile, et d'autres. « Comment on arrive ensemble à porter des idées et à transformer collectivement les choses ? C'est ça la question, c'est tout l'enjeu : l'élu ne doit pas se dire qu'il détient la vérité. Il est là pour écouter, pour servir de médiateur, pour construire avec d'autres ».
Une vision plus humble, plus complexe aussi, mais qui lui donne très envie de mettre en pratique ses belles idées.