CONSEIL MUNICIPAL DE ROUBAIX DU 6 OCTOBRE 2001
INTERVENTION SUR LE RAPPORT DE LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
Il n’est pas inutile de rappeler au préalable que les rapports de la Chambre Régionale des Comptes, dont la communication au conseil municipal, et donc à l’ensemble des citoyens, est obligatoire, sont de fait les seules études indépendantes d’une commande ville.
Cela rend donc ces études précieuses même s’il serait bien sûr abusif de considérer cette juridiction productrice d’une vérité définitive, et même si on peut regretter que l’usage d’une prudente langue de bois rende parfois le décodage un peu délicat au néophyte.
Ce rapport est consacré à des sujets dont la densité technique n’échappera à personne : la gestion de la dette, la Politique de la Ville, la gestion du personnel.
Il peut appeler de longues considérations techniques ou des simplifications abusives voir polémiques. J’essaierai d’éviter ces 2 écueils dans mon intervention sur la Politique de la Ville qui est fondamentale à Roubaix.
Je ne vais pas revenir sur sa généalogie depuis l’Alma Gare, ni sur son importance en terme de dispositifs, d’opérations, de masse financière mobilisée.
La Chambre, en analysant les dispositifs ANRU, la rénovation urbaine, et CUCS, les contrats de cohésion sociale, constate globalement la maitrise d’un dispositif technique complexe et la qualité de la coordination assurée par le futur ex premier adjoint.
Elle justifie l’importance de la solidarité financière symbolisée entre autres par la Dotation de Solidarité Urbaine.
Elle souligne les grands projets urbains et la rénovation urbaine.
Elle y voit un signe de réussite en matière de recomposition urbaine et d’amélioration de l’image de Roubaix.
Dans sa réponse, la ville prend bien évidemment acte, avec la satisfaction que l’on imagine, de la bonne opinion émise par la Chambre sur la qualité des programmes et des dispositifs.
Elle en vient à négliger quelques petits détails semés comme autant de petits cailloux :
· Le décalage ressenti par les acteurs de terrain et les habitants dans les quartiers.
· Les taux d’abstention record aux dernières élections.
· La tendance à la dégradation des indicateurs d’emploi et de précarité économique et sociale.
Tout élément faisant planer un doute sur la réussite du volet humain.
Doute qui fait se poser une question : finalement, à quoi çà sert tout ça, si la situation sociale ne s’améliore pas, si bon an mal an de 2005 à 2009, Roubaix gagne chaque année une place au classement de la DSU ?
On peut bien sur se rassurer en disant que cela serait bien pire si… et que les lendemains radieux finiront bien par arriver.
Dans les années 80, l’intuition de départ du développement social des quartiers était de valoriser les ressources humaines. Puis progressivement, à partir des années 90, la logique a changé, il ne s’agissait plus d’aider les gens mais d’aider les lieux et on a aboutit à la loi de 2003 dite loi Borloo, le centriste bien connu.
Le cœur de la Politique de la Ville, c’est la restructuration physique des quartiers, les opérations ANRU, on aide les collectivités, c’est la DSU, on aide les entreprises, ce sont les zones franches, et pour les habitants, il reste la portion congrue, les CUCS, et encore, car la logique dite de « professionnalisation » réduit encore leur part réelle.
Et le résultat dans le quel on se débat maintenant est que la fracture sociale s’est accrue au niveau local, infra communal ou communal dans le cas de Roubaix dont quasiment tout le territoire est concernée par la Politique de la Ville.
Et je voudrais dire à Monsieur Pick, que ce constat d’une augmentation de la fracture sociale au niveau local est un fait national.
L’analyse politique pêche un peu.
Finalement, c’est un peu comme pour la gestion financière, quand on y gagne une population plus riche, c’est parce qu’on a bien géré en gestionnaire efficace et compétent mais quand on perd, c’est la faute aux vilains communautaristes.
Il y aurait là matière à une sérieuse évaluation qui ne se contenterait pas de lister les réalisations mais examinerait les résultats au regard d’objectifs de réduction des inégalités.
Et il faudra bien réorienter les moyens vers l’humain.
Car même dans une simple logique de cohésion territoriale, c’est bien le comportement des ménages, leur tendance au regroupement spatial par catégorie sociale qui est décisif et c’est donc bien avec les gens qu’il faut travailler.
Christian CARLIER
6 octobre 2011