LILLE METROPOLE ET LA RECONQUETE DES FRICHES INDUSTRIELLES
La politique de Lille Métropole en matière de recyclage de friches industrielles a été réaffirmée dans le cadre du programme « Vivre ensemble notre Eurométropole ». Lille métropole affiche des ambitions volontaristes en matière de recyclage des friches industrielles au service des compétences communautaires sur l’ensemble du territoire.
Ainsi, plus que jamais la reconquête de la ville sur la ville devra être conduite par la poursuite des opérations de rénovation de l’habitat ancien, de renouvellement urbain et de recyclage des friches industrielles et urbaines. Il est également réaffirmé que cette stratégie de reconquête des friches est intimement liée à la mise en œuvre :
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de la ville renouvelée : s’inscrivant pleinement dans la politique de la ville renouvelée, les friches constituent un levier important pour reconquérir des secteurs en tissu urbain. Depuis 2001, 190 sites représentant 509 ha ont fait l’objet d’un projet identifié, dont la moitié en logement. Parmi eux 95 sites ont d’ores et déjà été réhabilités ou sont en passe de l’être. Pour cela le partenariat durable que Lille Métropole a conclu avec l’établissement Public Foncier Nord-Pas de Calais (EPF) a permis d’organiser le portage foncier de ces friches ainsi que, lorsque cela s’avérait nécessaire, sa dépollution.
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de la politique économique : concernant les friches industrielles de nombreuses opérations de réhabilitation sont d’ores et déjà engagées, dont celles des Rives de la Haute Deûle à Lille – Lomme, de Rhodia Marquette Saint André et La Madeleine, de la Bouverne à Marquette encore et de l’UNION à Roubaix Tourcoing et Wattrelos etc… d’autres sont en cours de lancement, comme l’ancien site de la Lainière à Roubaix et à Wattrelos.
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de la valorisation des espaces ouverts (friches, grands sites de nature) : Il faut poursuivre aussi le recyclage des grandes friches industrielles et des terrains pollués pour y créer de vastes espaces de respiration, contribuant à la biodiversité.
Lille métropole affiche clairement les friches comme autant de points stratégiques de développement qui nécessitent le passage à une logique « offensive » combinant la réflexion sur la pollution des sols avec l’aménagement du territoire. Cette nouvelle manière d’appréhender les friches et les sites pollués, non plus comme une fatalité mais plutôt comme une opportunité, participe directement à la maîtrise de l’étalement urbain et à l’amélioration de la qualité de l’environnement. Les friches constituent des outils de promotion de la ville durable et répondent ainsi aux enjeux urbanistiques, environnementaux, socioculturels, économiques, politiques.
S’appuyant sur les conclusions du rapport de la « mission d’information et d’évaluation friches industrielles et pollutions historiques » présenté lors du dernier conseil de communauté le 25 juin 2010, Lille Métropole devrait afficher, avant la fin de l’année, sa stratégie en la matière.
La requalification du site PCUK de Leers et Wattrelos constitue indéniablement une des vitrines de cette politique de reconquête des espaces dégradés au service des compétences communautaires (dans ce cas précis : l’Espace Naturel Métropolitain).
Aujourd’hui, la première phase de requalification du site PCUK, ancienne friche de 46ha, est terminée.
Le site, situé sur les communes de Leers et de Wattrelos, se trouve le long du canal de Roubaix et de l’Espierre, à l’interface de plusieurs espaces de projets (site économique du Sartel, crématorium, projet de requalification de l’Espierre et remise en navigation du canal de Roubaix dans le cadre du projet Blue Links).
La 1ère phase de reconversion a nécessité 3 ans d’étude (2004/2007) et 3 ans de travaux (2007/2010) et un budget d’environs 13 M€ financés par l’Agence de l’eau, l’Etat, l’Europe, Rhodia, la société Ekinox et Lille Métropole. Cette requalification environnementale a fait l’objet d’un protocole d’accord entre Rhodia, l’Etablissement Public Foncier et Lille Métropole.
L’objectif du projet a été d’intégrer ce site après traitement dans l’Espace Naturel Métropolitain en prenant en compte :
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La gestion durable de la pollution
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L’amélioration de la qualité du canal de l’Espierre en limitant les rejets de chrome
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L’insertion de ce site dans la trame verte et bleue métropolitaine par la mise en place d’un grand espace naturel connecté au canal de Roubaix
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L’utilisation des matériaux de curage du canal dans la requalification pour préserver les espaces agricoles et en faisant des économies d’échelle sur l’apport des matériaux nécessaires à la requalification.
L’ouverture partielle du site au public est prévue à la fin du 1er semestre 2011, laissant le temps à la végétation de se développer. D’ici là, des visites exceptionnelles du site à caractère pédagogique et de sensibilisation à l’environnement pourront être organisées.
La friche Produits Chimiques Ugine Kulhmann est située dans le quartier du Sartel à Wattrelos. Fermé en 1983, et repris à cette date par Rhône Poulenc devenu Rhodia, le site PCUK de Wattrelos a connu plusieurs tentatives de reconversions menées avec l’appui des collectivités locales. Elles ont abouti au démantèlement partiel de la propriété et au développement d’activités économiques plus ou moins durables.
Le site PCUK a été exploité pour des activités de chimie de base. La production d’acide phosphorique a généré un terril de phosphogypse de 3 millions de tonnes et celle du chrome, deux terrils de charrées de chrome (résidu de chrome), un de 150 000 m3 et un autre de 500 000 m3.
La partie du site se situant sur Leers était une zone de dépôt ayant accueilli des remblais divers sur 4 à 4,5 mètres de hauteur représentant un volume de 6 800 m3, et des dépôts de gypse sur 4 à 5 mètres de hauteur représentant un volume de 33 000m3.
Après l’arrêt de l’activité économique, le site est devenu une vaste friche industrielle, sans affectation cohérente et répartie entre plusieurs propriétaires publics et privés : la Ville de Wattrelos, les sociétés Ekinox, Intertcoop et Rhodia.
Tant pour Lille Métropole que pour les communes de Wattrelos et de Leers, la problématique de la requalification du site a été posée dans la perspective de l’amélioration de la qualité des eaux du canal de l’Espierre, d’un traitement durable de la pollution, d’une réinsertion du site dans la trame verte communautaire, de l’accompagnement de l’aménagement des berges du canal de Roubaix et de la réhabilitation future du quartier du Sartel.
Compte tenu de la complexité de l’opération, l’Etablissement Public Foncier (EPF) a été désigné comme ensemblier de l’opération, via un protocole d’accord signé entre Lille Métropole, EPF et Rhodia en septembre 2006, permettant de définir le cadre juridique, technique et financier de l’opération.
Les travaux ont commencé début d’année 2007, pour se terminer au 1er semestre 2010. Il aura fallu 3 ans pour requalifier le site. Fin 2009, le site a été transféré à Lille Métropole qui en devient officiellement propriétaire.
Dans le cadre d’un projet de développement durable, la requalification de la Friche PCUK de 46 Ha a visé à:
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la gestion globale et durable de la pollution (stabilisation et confinement)
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l’amélioration et à la maîtrise de la qualité des eaux du canal de l’Espierre
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l’insertion de ce site dans la trame verte métropolitaine
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l’utilisation des matériaux de curages (sédiments) du projet Blue Links en permettant l’économie de terres agricoles (dans le cadre de la requalification environnementale)
La conduite d' alimentation principale en eau potable de toute l' agglomeration roubaisienne a été déplacée afin de ne plus traverser ce site et de sécuriser l' approvisionnement.
Le réseau d’assainissement (par exemple l’égout Berthelot), principal vecteur de pollutions, a été supprimé.
Les pollutions de surface ont été traitées par la mise en place de cellules de confinement. La requalification a consisté à isoler les terres polluées de la surface en mettant en place différentes couches de matériaux (couche de forme : limons peu perméables, couche de drainage, géomembrane, matériaux de modelage, au minimum 50 cm d’argile, terres végétales) qui assurent l’imperméabilisation totale entre la surface et les zones contaminées. L’argile a été recouverte par de la terre végétale, afin de permettre les aménagements paysagers.
Un réseau de noues (petits fossés) permet de récupérer et gérer les eaux de ruissellement afin d’alimenter les bassins de tamponnement avant le rejet dans l’Espierre.
Le site a bénéficié d’aménagements paysagers afin de recréer différents milieux de nature augmentant ainsi la potentialité écologique du site et s’intégrant dans le corridor écologique du canal de Roubaix. Dans ce cadre, pas moins de 68 450 végétaux (arbres, arbustes, plantes aquatiques) ont été plantés. Une surface de 25,3 Ha (terril de phosphogypse non compris) a été requalifiée en espace naturel dont 5,6 Ha de zone humide. Des cheminements ont été également créés. Néanmoins, le site sera partiellement accessible.
Une partie des sédiments de dragage (130 000 m3) issus du canal de Roubaix a contribué à la requalification du site. Cette requalification a été encadrée par un arrêté préfectoral ; la DREAL (ex. DRIRE) assure le suivi de sa mise en œuvre. Cet arrêté permet de définir les seuils de pollution à ne pas franchir. De ce fait, les matériaux ne répondant pas aux normes de l’arrêté ont été exportés afin d’être traités sur d’autres sites.
Un réseau de piézomètres (instruments de mesure du niveau de la nappe) a été installé pour assurer la surveillance continue du site et vérifier, dans le temps, la fiabilité des dispositifs de gestion de la pollution.
Les deux terrils de chrome n’ont pas été intégrés au premier protocole d’accord et restent propriété de Rhodia. Une étude pour le traitement environnemental est menée actuellement par Rhodia afin de tester la technique IRZ (In situ Réactive Zone - Copyright); technique innovante de remédiation du terril de chrome. Elle consiste à injecter une mélasse contenant des bactéries qui transforment le chrome en une forme stable par un procédé physico-chimique.
Une fois le procédé technique abouti, Lille Métropole procèdera à l’analyse technique et financière des solutions proposées. L’objectif est d’intégrer les deux terrils dans un projet global de requalification.
Aujourd’hui les résultats sont probants. Le taux de chrome relevé au niveau de la station Grimonpont à Wattrelos qui traite les eaux du Canal de l’Espierre a fortement diminué suite à la requalification du site PCUK. On peut affirmer par déduction que le site PCUK n’est plus aujourd’hui vecteur de pollution chromée.
De même, la faune commence à s’approprier le site. On peut dès à présent observer de nombreuses espèces d’oiseaux et d’insectes.
A l’issue de la requalification du site menée par l’EPF, le site a été racheté par Lille Métropole qui en a confié la gestion et l’animation au syndicat mixte Espace Naturel Lille Métropole.
Le service Espace Naturel et voie d’eau de Lille Métropole interviendra de nouveau à l’automne 2010, afin de réaliser des aménagements paysagers complémentaires notamment pour boiser une parcelle au pied du terril rue Leuridan Noclain à Wattrelos. L’aménagement de la lagune derrière la station de pompage devrait avoir lieu en 2011 afin de laisser les sols se stabiliser.
Lors du comité de pilotage du 20 mai 2010, il a été décidé par l’ensemble des participants de laisser le site fermé au public pendant 1 an afin de laisser les sols se stabiliser et la jeune végétation s’installer.
Le terril de phosphogypse sera quant à lui fermé au moins deux années pour que les dépôts de sédiments se stabilisent et que l’expression spontanée de la végétation puisse se faire. L’évolution du site permettra de définir le type d’intervention et d’aménagements complémentaires à mener avant l’ouverture au public.
Afin d’expliquer la méthodologie mise en place, des visites encadrées, à caractère pédagogique, vers un public ciblé tel que les associations ou les écoles pourront être organisées. La fête de la science le 23 octobre 2010 sera également l’occasion d’une ouverture exceptionnelle au public via des visites guidées. Aux entrées du site, des panneaux pédagogiques seront également installés pour sensibiliser les visiteurs à la fragilité de cet espace naturel nouvellement créé.
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- Actualité Métropole
- À Wattrelos, la nature reprend ses droits sur la friche PCUK
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- lundi 12.07.2010, 05:07 - La Voix du Nord
Le «mont Kuhlman» culmine à 30m. On domine l'agglomération roubaisienne... et les terrils encore en cours de traitement. | RECONVERSION |
« À une époque, on imaginait enlever le mont Kuhlman et le mettre ailleurs. ...
En Corrèze, dans le Zambèze... Mais nos merdes, on les garde dans la communauté urbaine ! » Slimane Tir est volontairement provocateur quand il résume l'enjeu de la réhabilitation de la friche PCUK, à Wattrelos.
Si le vice-président de LMCU en charge de l'espace naturel parle ainsi, c'est qu'aujourd'hui, « cette opération est une vitrine de (notre) savoir-faire ». Car ce qui était l'un des sites les plus pollués de la métropole, devient progressivement fréquentable. Mieux, dans un an, après des années de travaux et quelque 13 millions d'euros investis, l'ancien site chimique sera une zone naturelle.
Après des terrassements, destinés à confiner et à remodeler les 3 millions de tonnes de phosphogypse entassés là, les boues du canal ont été répandues pour constituer une couche étanche. De la terre végétale au-dessus, 60 000 plantes et arbres introduits, des mares qui filtrent les eaux et déjà, « la nature reprend ses droits ». « Mais cela peut prendre des années », constate Michel Pacaux, vice-président de LMCU en charge des friches industrielles.
Si des espèces animales et végétales ont déjà réinvesti les lieux, il faudra encore un an pour que la biodiversité s'installe vraiment et que le public soit autorisé à se promener dans cet espace de 40 hectares. Et encore, tout ne lui sera pas encore ouvert. Le haut du terril de phosphogypse sera réellement accessible dans deux ans.
Et puis il reste le gros point noir : les deux terrils de chromes, propriété de l'industriel Rhodia, qui y expérimente un procédé destiné à stabiliser le chrome 3 et éviter, qu'au contact de l'eau, il ne se transforme en chrome 6, très toxique. Des substances qui arrivaient auparavant directement dans l'Espierre, mi-rivière, mi-égoût à ciel ouvert, pour échouer à la station du Grimonpont, à Wattrelos. Entre 2007 et aujourd'hui, la teneur en chrome y a été divisée par trois. On serait dans les normes, mais c'est aussi parce que les eaux de ruissellement sont encore captées et traitées séparément. • M. G.
ROUBAIX / CHANTIER
Site Kuhlmann : les oiseaux s'installent...
Publié le samedi 10 juillet 2010 à 06h00
Ci-dessus le point culminant du site, la «montagne de Wattrelos». Ci-dessous, les élus et techniciens écoutent Sophie Fourny de LMCU. Les goélands se sont installés sur le terril. Quant au public, il attendra encore un peu : il ne faudra pas compter venir se promener sur le site PCUK avant l'été 2011. Le chantier est terminé. Faune et flore s'installent. Des visites seront organisées pour les comités de quartiers progressivement à partir du mois d'octobre.
DELPHINE TONNERRE > delphine.tonnerre@nordeclair.fr
Lunaire. Dépouillé. Le site PCUK (Produits Chimiques Usine Kuhlmann) poursuit à l'abri des regards sa transformation.
Le vilain site pollué va devenir un bel espace de promenade de 46 hectares. Le public devra attendre pour en profiter : « Les travaux sont terminés mais il faut maintenant laisser à la faune et à la flore le temps de s'installer... » explique Sophie Fourny, responsable du service des espaces naturels et des voies d'eau à LMCU.
Ce n'est qu'à l'été 2011 que les voisins wattrelosiens et leersois pourront venir fouler les allées du site en toute légalité. C'est long. Mais nécessaire.
Il a fallu trois ans, de 2004 à 2006, pour mener toutes les études et démarches préparatoires, et autres négociations, « menées notamment par l'Établissement public foncier », rappelle Michel Pacaux, maire de Frelinghien et vice-président de LMCU en charge des friches industrielles.
Puis les travaux ont eu lieu, en 2007 et 2008. Les deux années suivantes, 2009 et 2010, ne sont pas inutiles : elles sont dédiées à l'aménagement paysager et au retour de la nature. Alors, seulement, les premiers visiteurs pourront arriver.
Pas question d'y installer des tables de pique-nique, des jeux pour enfants ou un parcours sportif. Le promeneur devra se monter discret. Se contenter d'observer depuis une ou deux tables d'orientation le spectacle de la nature qui reprend ses droits.
Une ironie du sort car on est bien en fait sur l'un des sites les plus pollués de la métropole : un siècle de production industrielle d'acide phosphorique a laissé sur place trois millions de m³ de déchets, un terril de phosphogypse bien encombrant. « La condition pour que l'ENM s'occupe de ce dossier, c'était qu'il devienne un espace de nature de proximité, pour une vraie sortie par le haut », rappelle Slimane Tir, président de l'ENM (Espace naturel métropolitain).
Les deux terrils de charrées de chrome restent propriété de la société Rhodia, et ne seront pas accessibles. La technique, pour éviter que le chrome ne parte dans l'eau, c'est de le rendre inerte sur place, en injectant une mélasse qui contient des bactéries. Une transformation radicale et définitive (nous dit-on). Cette technologie innovante s'appelle IRZ (In Situ réactive), une marque déposée déjà utilisée aux États-Unis mais dont c'est la première application en Europe.
Fermé en 1983, il aura donc fallu quasiment trente ans pour parachever la métamorphose du site Kuhlmann. Coût total : 13 millions d'euros financés par l'Agence de l'eau, l'État, l'Europe, les sociétés Rhodia et Ekinox. Lille Métropole Communauté urbaine a mis 3 millions d'euros dans ce tour de table.
Le site encore fragile est hélas régulièrement visité. En attestent les grillages forcés. D'autres visiteurs sont eux non seulement acceptés mais observés de près : les oiseaux (pigeons, martinets, gravelots, goélands, foulques...) ont repéré ce grand espace, parfait pour nicher.