Vous trouverez ci-dessous l’intervention de C. Carlier pour le groupe des élus roubaisiens
"OuVertement à Gauche" ainsi que l’amendement déposé au conseil municipal au sujet de l'extension du Musée La Piscine autour de la reconstitution à l identique de l’atelier de Henri Bouchard et de son utilisation à des fins pédagogiques...
Géré de façon très confidentielle, ce dossier revient en Conseil Municipal, une nouvelle fois par obligation et non parce qu un débat ouvert sur l opportunité de ce choix serait légitime.
Ce , en raison d ' une décision relative à la constitution d' un jury d' appel d' offres et l' ampleur des travaux à réaliser intégrant ENFIN une prise en compte de l' aventure picturale du Groupe de Roubaix ( que nous avons toujours considérée comme plus pertinente en tant que développement possible du musée ) et une saisine de Lille Métropole concernant un transfert de compétence afin d' assurer une prise en charge totale ou partielle des coûts d' investissement et de fonctionnement. ( demande que nous considérons comme pertinente et nécessaire en raison du rayonnement et du succès de notre musée)
Autant de sujets " lourds" rassemblés dans un même texte afin d' enfermer manifestement tous les groupes et sensibilités politiques dans un vote positif et de soutien.
La manoeuvre a échoué puisque le groupe de l'opposition de droite mené par M.A. PICK a proposé un amendement de séparation de la proposition de transfert de compétence car il souhaite garder le musée dans le giron municipal. Le rejet de son amendement lui donnant l' occasion de ne pas se laisser enfermer.
Considérant l état actuel de la situation communautaire, la multitude de ses engagements financiers, les réticences exprimées par exemple quant à la participation sur le Vélodrome Couvert, on peut effectivement craindre qu il ne s agisse en l espèce que d un voeu pieux, afin de faire "avaler " la délibération proposée.
D' où une question conséquente : Au regard de l' état des finances communales, le refus éventuel par LMCU de la demande de transfert de compétence signifiera t il l enterrement, dans les prochains mois, de ces travaux d agrandissement ??
CONSEIL MUNICIPAL DU 14 AVRIL 2011
Nous avons donc ce soir 3 délibérations sur 3 équipements culturels majeurs de Roubaix : le conservatoire, la médiathèque et le musée.
C’est presque l’occasion de faire le tour de la politique culturelle.
Presque, puisque nous n’avons rien ce soir sur l’avenir de la danse à Roubaix, de toutes les danses, alors qu’articles de presse et rumeurs fleurissent…
Et rien non plus sur le projet d’accueil d’une antenne de l’Institut du Monde Arabe.
Ce projet est certes plus régional que spécifiquement roubaisien mais il concernera quand même fortement Roubaix puisque il sera sans doute localisé à l’Union. Nous ne doutons pas qu’il sera porteur d’activités culturelles ouvertes sur le vaste monde, ouvertes à tous et à toutes, antidote à tous les enfermements.
Revenons donc à nos délibérations.
La rénovation du Conservatoire était nécessaire, je ne reviendrais pas sur la vétusté des locaux et les normes de sécurité.
C’est pour nous l’occasion de rappeler l’importance de ce lieu d’éveil artistique qui travaille en partenariat avec le milieu scolaire, un lieu d’apprentissage et de développement de la pratique amateur, un lieu de formation professionnelle, le lieu d’une pratique artistique réelle et de son apprentissage, pas seulement de consommation.
Pour la médiathèque, il était urgent et vital d’agir pour maintenir le niveau de cet équipement. C’est aussi l’occasion de rappeler l’importance de l’écrit, l’importance de la lecture et de l’étude, d’affirmer qu’il soit un lieu d’animations, en partenariat par exemple avec les librairies indépendantes de Roubaix.
Le projet aurait certes pu être plus ambitieux, nous avions en son temps proposé des médiathèques de quartier. Nous prenons acte cependant que soient apparemment préservées les possibilités d’un futur développement, il reste fort à faire en particulier en matière d’archives.
Que la rénovation de la vieillotte et inconfortable salle des conférences soit engagée est une bonne chose.
Mettre ce projet en annexe à celui de la médiathèque étonne un peu, il méritait peut être d’être valorisé dans une délibération spécifique qui aurait pu insister sur la création d’un outil moderne utile aussi à la démocratie participative.
Nous voterons donc sans problème ces 2 délibérations.
Nous avons ensuite avec le musée une délibération plus complexe.
Cette délibération nous propose d’abord un agrandissement en pas moins de 4 extensions.
Evacuons tout d’abord, l’extension en neuf rue des Champs pour des locaux techniques et l’extension en réhabilitation de l’ancien collège pour des locaux d’animation et les réserves de la tissuthèque.
Ces 2 extensions n’amènent pas de remarques particulières.
Sinon que l’amélioration des conditions de travail et de vie du personnel, des conditions d’accueil des activités d’animation à destination des jeunes publics ne peut que susciter l’approbation, d’autant plus qu’il est fait un travail tout à fait remarquable.
L’extension sous forme d’un réaménagement de la galerie pour accueillir le groupe de Roubaix et l’extension en neuf rue de l’Espérance pour un espace consacré à la sculpture suscite quelques interrogations et au final une interrogation de fond sur le positionnement de notre musée.
Tout d’abord, nous nous réjouissons très fort que le musée prenne à bras le corps l’accueil du groupe de Roubaix. Ce groupe est dit de Roubaix pour la gloire de Roubaix mais cette appellation peut donner une image faussement localiste à ce groupe qui rassemble des artistes régionaux certes mais de dimension nationale et internationale comme en témoigne la très importante exposition que le musée de Tourcoing vient de consacrer à Eugène LEROY.
Et nous nous en réjouissons d’autant plus que nous n’avons pas été les derniers à promouvoir cette prise en charge.
Mais le confiner dans cette galerie qui est, il faut bien le dire, un loupé de la rénovation puisque ce qui était initialement un accès et une montée vers la lumière est devenue une sombre impasse prise à contre sens, n’est ce pas marginaliser cet ensemble d’œuvres qui devrait être maintenant le cœur du musée ?
Historiquement, le musée est d’industrie, le textile bien sur, il a assumé les beaux arts, pour ne pas dire l’académisme, y compris local, les arts décoratifs et sur ces créneaux pas forcément bien considérés, il a construit une réussite.
Cette extension au moment de son dixième anniversaire est comme une croisée des chemins.
Ce programme se veut habile en cherchant à contenter tout le monde mais il est vicié par un refus de choisir, par un arbitrage en fait déséquilibré entre le « projet groupe de Roubaix » et un « projet sculpture » dénaturé par l’histoire Bouchard.
Nous nous sommes largement exprimé en son temps sur cette donation Bouchard dont personne ne voulait, acceptée avec tant de légèreté par le précédent conseil, et dont entre parenthèses, nous ignorons toujours l’état juridique. Cet acte notarié dont nous n’avons jamais eu connaissance, est il maintenant signé ?
Nous nous y sommes opposés et nous persistons à penser qu’il s’agit d’une erreur politique et stratégique majeure, dont le gain espéré - disposer d’un outil pour présenter les techniques de la sculpture - est dérisoire par rapport à son coût exorbitant - assumer la contextualisation des errements politiques de l’académisme officiel de la 3 ème république -.
En plus d’être un message tout à fait inapproprié, il s’agit de l’expression d’une conception des choses où le relativisme prime la claire affirmation de valeurs, conception que je n’ose qualifier de centriste, eu égard à la qualité des personnes qui se sont parfois ainsi qualifiées.
Nous présentons en conséquence un amendement.
Enfin, cette délibération, décidément très complexe, propose en final une demande de transfert du musée à Lille Métropole Communauté Urbaine.
Le problème est réel, la question légitime, cela mérite un débat approfondi.
Mais pourquoi faut il mêler cette question à cette délibération ?
Sans désapprouver la demande, nous nous étonnons de la méthode qui semble relever de la diversion et affaiblit la démarche.
Christian CARLIER
Groupe OuVERTement à Gauche
Ci dessous l ’amendement proposé par le Groupe Ouvertement a Gauche visant à retirer de la phrase relative à la confirmation par le Conseil Municipal de l'extension du Musée la Piscine autour de l'œuvre de H Bouchard. Cet amendement a été rejeté par la majorité municipale sur proposition du Maire. :
CONSEIL MUNICIPAL du 14 AVRIL 2011
AMENDEMENT SUR LA DELIBERATION 2011 D 157 RELATIVE A L’AGRANDISSEMENT DU MUSEE « LA PISCINE »
Considérant
• que l’article 1 de la délibération vaut approbation du programme de l’opération,
• qu’en l’absence de l’étude de programmation et d’un programme annexés à la délibération, le programme est déterminé par le préambule de la délibération.
Considérant
• que la reconstitution de l’atelier du sculpteur Henri BOUCHARD sous couvert d’une information sur les techniques de la sculpture, constitue une célébration d’un artiste engagé institutionnellement dans la collaboration avec l’occupant nazi,
• que cette célébration entretient de fait la confusion qui relativise collaboration et résistance au prétexte de contextualisation et au risque de réhabiliter la collaboration et d’affaiblir les valeurs de la résistance,
• que cela est en contradiction avec un développement du musée fondé sur la modernité et l’ouverture.
Le paragraphe :
« La seconde présentera, avec notamment l’atelier reconstitué d’Henri BOUCHARD, le métier et les techniques de la sculpture. »
est retiré de la délibération.
Amendement présenté par le Groupe « OuVERTement à Gauche »
Si vous souhaitez vous forger votre opinion sur ce sujet, voici une série d’articles aux liens suivants :
- Henri Bouchard sur wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Bouchard
- Comité français pour Yad Vashem (« Une extension de Musée pour un membre du groupe "Collaboration" ») : http://www.yadvashem-france.org/reportages/?mode=detail&reportages_id=123
- Comité français pour Yad Vashem, « L'ombre de Bouchard rend trouble la Piscine de Roubaix » : http://www.yadvashem-france.org/reportages/?mode=detail&reportages_id=138
-Blog de Slimane Tir : http://www.slimanetir.com/article-21501126.html (« Bouchard et la collaboration », publié le 14 juillet 2088) et http://www.slimanetir.com/article-20574603.html (« Bouchard, intérêt de la donation ? » publié le 19 juin 2008)
-Article dans Nord Eclair (« Bouchard, toujours Bouchard ») : http://www.nordeclair.fr/Locales/Roubaix/2011/04/15/en-attendant-l-union-1-on-parle-de-l-uni.shtml
-Rue 89, « Bouchard, sculpteur collabo, met le feu à La Piscine de Roubaix », Par Jean-Pierre Thibaudat | Journaliste | 05/08/2008 http://www.rue89.com/balagan/bouchard-sculpteur-collabo-met-le-feu-a-la-piscine-de-roubaix?page=1
-Le Monde (Un artiste qui a flirté avec les nazis va être mis en valeur à Roubaix, 15.06.2008) :
Un artiste qui a flirté avec les nazis va être mis en valeur à Roubaix
Article paru dans l'édition du 15.06.08
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http://medias.lemonde.fr/mmpub/img/let/f.gifaut-il transférer l'atelier d'Henri Bouchard (1875-1960), sculpteur académique qui a fait le voyage en Allemagne pendant la seconde guerre mondiale et qui a exprimé sa sympathie pour l'occupant nazi, au musée de La Piscine, à Roubaix ? Et l'artiste est-il important au point que ce musée du Nord engage des travaux d'extension pour reconstituer son atelier - installé jusqu'en 2007 dans le 16e arrondissement de Paris - et accueillir ses 1 296 oeuvres, des sculptures mais aussi des dessins ?
Ces deux questions sont déjà tranchées, et le débat n'a pas eu lieu. Le passé de Bouchard n'a jamais été évoqué dans la longue chaîne de décisions qui a précédé le décret ministériel de décembre 2006, autorisant le transfert de propriété de l'atelier qui appartenait à l'un des fils du sculpteur, François Bouchard. Seuls les Verts de Roubaix ont tenté de barrer la route au projet, en vain.
L'étude de programmation de l'extension du musée a été lancée la semaine dernière et le maire socialiste, René Vandierendonck, a promis l'ouverture de l'atelier en 2011 - en attendant, une cinquantaine de ses dessins seront exposées à La Piscine du 21 juin au 20 septembre.
« On construira aussi deux ateliers de pratique artistique pour initier les jeunes », explique l'adjoint à la culture, Jean-François Boudailliez (apparenté MoDem), qui ne voit pas le problème : « Bouchard a déjà payé à la Libération [il a été notamment suspendu de son poste de professeur à l'Ecole des beaux-arts]. Je ne suis pas pour la double peine. » Christian Carlier, conseiller municipal étiqueté chez les Verts, non plus... « Mais se servir de l'oeuvre de Bouchard comme support pédagogique en direction du public scolaire, cela me choque », explique l'élu écologiste, dans l'opposition depuis les municipales de mars.
Henri Bouchard ne fut pas le seul « pèlerin de Weimar ». Derain, Vlaminck, Despiau, Landowski, Belmondo, ont répondu à l'invitation de l'Allemagne, en novembre 1941. Mais, loin de regretter ce périple, Bouchard, de retour en France, a signé un article dans L'Illustration que certains ne lui pardonneront jamais. Il y décrit « la vie presque féerique » des « enfants chéris de la nation » allemande, s'enthousiasme pour les cités-jardins réservées aux artistes, comme le rapporte l'historienne de l'art Laurence Bertrand Dorléac dans L'Art de la défaite (Seuil, 1993).
Bouchard a visité l'exposition du sculpteur Arno Brecker, « le favori du Reich », à l'Orangerie des Tuileries, en 1942. On lui reproche aussi d'avoir milité pour la création d'un ordre des artistes.
Bruno Gaudichon, conservateur de La Piscine, insiste : « Il y aura des fiches pour les visiteurs sur les liens entre la sculpture et le pouvoir politique. » Dérouté par cette polémique, il lâche : « A ce compte-là, on devrait interdire Céline dans les bibliothèques ! » Mais Bouchard n'est pas l'auteur du Voyage au bout de la nuit. Et sa sculpture n'a rien d'exceptionnel. Durant sa carrière, il a répondu à diverses commandes politiques : un monument dédié au « génie colonisateur français » en Algérie, détruit dans les années 1960 ; des oeuvres louant le travailleur - Le Faucheur - à l'époque du Front populaire, etc.
« UNE PETITE FAMILLE »
Tout le monde est d'accord là-dessus : « Ce qui l'a emporté, au-delà de l'erreur historique de l'artiste, c'est le souci de conserver un atelier intact et vivant où l'on trouve encore les outils de Bouchard », dit Marie-Hélène Lavallée, qui a suivi le dossier au ministère de la culture. « On a l'impression qu'il a quitté la pièce il y a deux heures. C'est le seul atelier complet de cette génération. Si on y avait renoncé, il aurait sans doute disparu », renchérit Bruno Gaudichon, qui dispose d'un important fonds de sculptures du XIXe siècle et début XXe à La Piscine. « François Bouchard et son épouse Marie ont passé leur vie à entretenir l'atelier. Ils ont proposé à la Ville de Paris de le récupérer dans les années 1990. Elle n'en a pas voulu », ajoute-t-il.
Dernière question : pourquoi l'oeuvre de Bouchard, natif de Dijon - dont le Musée des beaux-arts possède des sculptures - atterrit-elle à Roubaix ? La réponse est sans doute la clé de l'histoire : la belle-fille du sculpteur, Marie Bouchard, est devenue conservatrice pour préserver au mieux l'atelier - qui sera classé « musée de France » en 1985. Elle s'est liée d'amitié, entre autres, avec Bruno Gaudichon, du musée de Roubaix, et Antoinette Le Normand-Romain, aujourd'hui directrice générale de l'Institut national d'histoire de l'art (INHA). Cette dernière a eu l'idée d'envoyer l'atelier à Roubaix. Elle le reconnaît : « Cette sculpture a longtemps été snobée pour son académisme. Aujourd'hui, nous formons une petite famille. » Très soudée.
Clarisse Fabre