Il y a quelques années, la ville de Roubaix se voyait primée, du prix Orwell de la
surveillance, dans le cadre des « Big Brother Awards – France - 2002 ».
Etait visé à l’époque un projet de cartographie de la délinquance. Aujourd’hui, avec le projet qui nous est soumis, quel prix allons-nous récolter ?
Cette délibération sur le développement de la vidéosurveillance appelle plusieurs réflexions :
1° en ce qui concerne le coût de l’investissement :
Dans le mandat précédent, nous avons délibéré à plusieurs reprises pour
voter des crédits pour la rénovation, la maintenance le remplacement du
matériel existant pour un coût total de 400.000 € environ.
Aujourd’hui, on nous demande d’investir 900.000 € d’argent public
pour développer encore le réseau de vidéosurveillance. Ce qui nous engagera aussi à déployer, vous le comprenez, de nouveaux crédits de maintenance et d'accroitre les dépenses de fonctionnement.
Tout compris, on peut estimer à au minimum 2 millions d’euros l’argent
public qu’on nous demande d’engloutir pendant ce mandat pour faire
fonctionner la vidéo surveillance.
2) Certains diront qu'il faut saisir une opportunité financière ...
En effet, le fond interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) pourrait
payer 50% des dépenses. C’est ne pas connaître l’étendue des possibilités d’intervention du FIPD.
Avec ce fonds, l’Etat peut aussi financer des actions de lutte contre le
décrochage scolaire, des médiateurs, des actions de prévention de la
délinquance.
Ne serait-il pas plus judicieux d’aller chercher l’aide de l’Etat sur ces
questions ? Ne serait ce pas plus judicieux de relancer l’Etat sur le dispositif adulte relais ou les médiateurs qui permettaient de développer le lien avec les jeunes ou encore de relancer la médiation et la police de proximité ? A moins que nous ayons choisi dans cette ville aujourd’hui d'être complice du tout sécuritaire de Sarkozy avec le tout filmé.
3) Sur l’intérêt des caméras en matière de sécurisation des espaces publics:
Les études sur le sujet relativisent l’efficacité du système. L’étude de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Ile-de-France (Iaurif) de mars 2004 dresse un constat mitigé : "D’un point de vue strictement quantitatif, la vidéosurveillance ne traduit pas une baisse significative de la délinquance stricto sensu » Ces travaux montrent que les caméras n’ont pas d’impact déterminant sur le volume de la délinquance mais qu’elles contribuent au déplacement de la criminalité, dans des quartiers non surveillés.
Les vidéos n’ont aucun effet préventif. Elles sont un outil parmi d’autres pour retrouver les coupables, mais c’est tout.
4) En ce qui concerne les libertés individuelles :
Le 13 décembre dernier, nous avons délibéré sur la création d’un comité
d’éthique de la vidéosurveillance.
A ce jour, nous n’avons pas – à ma connaissance – permis au comité d’éthique de formuler
des avis sur les précautions à prendre et les limites à poser à
l’installation d’un réseau.
Le problème majeur, c’est le traitement des données. On ne sait pas comment ces informations sont gérées ni par qui. La loi du 23 janvier 2006 resserre l’étau autour du citoyen. Dorénavant les policiers et les gendarmes peuvent avoir accès directement aux images collectées sans le contrôle du juge.
C’est dangereux.
Surveiller le musée la Piscine, la condition publique, la médiathèque, la maison des services, le piscine Thalassa (c'est-à-dire le Colisée) et le parc Barbieux. N’est ce pas du voyeurisme un parc sous la haute surveillance des caméras ? Demain, ce sont les écoles, les lycées, votre maison… je vous laisse continuer la liste.
Aussi, nous exprimons une très nette mise en garde face à ce développement d’une technique qui vient dénier le droit de chacun à l’anonymat ; le droit à n’être ni suivi, ni espionné, ni inquiété tant qu’on n’est pas soupçonnée d’actes répréhensible, et sous le contrôle stricte du juge.
La définition d'une politique de la sécurité ne peut pas se résumer à installer des nouveaux équipements, dans la ville ! Cessons donc de voir cette question par le petit bout de l’œil de la caméra ! Ce doit être une politique durable qui installe des relations humaines meilleures, non violentes, entre les habitants de notre ville.
Alors Monsieur Olszewski votre objectif est-il de mettre toute la ville sous haute surveillance en répondant régulièrement à des opportunités financières ?
D’autant plus que cela coûte cher, cela pourrait être dangereux.
Des milliers de citoyens vont être filmés.
Qui va contrôler la démarche ? Et surtout pourquoi ?
Qu'est ce que cela apporte en matière de sécurité ?
Avons-nous des chiffres qui nous indiquent une réelle diminution de la délinquance à Roubaix depuis la mise en place de la vidéosurveillance ?