Intervention de Mme Martine Billard - groupe GDR (à l’origine de la demande d’un débat sur la situation au Proche-Orient)
« Camp d’internement à ciel ouvert » : « Gaza, c’est aujourd’hui un camp d’internement à ciel ouvert, ravagé par le chômage et la pauvreté, coupé du monde par un blocus militaire, pilonné par une des armées les plus puissantes du monde. Gaza, c’est aussi 360 kilomètres carrés contrôlés pour presque la moitié par une armée d’occupation, avec une population d’environ 1,5 million de Palestiniens sans aucune possibilité de fuir l’horreur des bombardements ».
Victoire politique du Hamas : « Après trois semaines passées sous les bombes, l’organisation islamiste a malheureusement déjà remporté une victoire politique décisive. En effet, transformer la vie des Gazaouis en enfer ne conduit pas la population à se soulever contre le Hamas mais, au contraire, à faire bloc derrière lui. Si Israël avait voulu faire la démonstration que l’Autorité palestinienne n’existait plus politiquement et que la seule autorité crédible était le Hamas, il n’aurait pas procédé autrement. ».
Responsabilité de l’Europe : « Lorsque la médiation des gouvernements arabes a abouti à un projet de gouvernement d’union nationale palestinienne, Israël, l’administration américaine et l’Union européenne ont refusé cette perspective et ont entériné la partition de fait entre Gaza et la Cisjordanie, renforçant ainsi malheureusement le sentiment des Palestiniens que le Hamas est la seule force sur laquelle ils peuvent compter […] Pour l’heure, il faut tout faire pour que cesse le carnage. Pour cela, il faut agir et contraindre le gouvernement israélien à cesser les opérations militaires.
La présidence française est responsable d’avoir incité le Conseil des ministres de l’Union européenne, en décembre, à prendre la décision de rehausser les accords de coopération […] Le renforcement de l’intégration économique et politique avec Israël, sous la présidence européenne de Nicolas Sarkozy, et ce sans aucune condition, sans aucun engagement sur un règlement politique du conflit et le démantèlement des colonies, a privé l’Europe de capacités à agir en faveur d’un règlement politique du conflit ».
« Éviter de sombrer dans cette logique qui consiste à ne pas établir de différence de nature entre les protagonistes ».
« Il existe une situation coloniale. Israël doit comprendre qu’un État démocratique ne peut coloniser un peuple sans que celui-ci résiste. Israël a tort de penser que son projet de bantoustans peut se perpétuer et fonctionner. La transformation de la Cisjordanie en confettis palestiniens de plus en plus petits, isolés les uns des autres, ne peut qu’entretenir le désespoir d’une population palestinienne qui a l’impression que son espoir de pouvoir vivre un jour ou l’autre, en paix, dans un État indépendant, ressemble de plus en plus à une chimère. Tant qu’un projet viable d’État palestinien, avec Jérusalem-Est pour capitale, ne sera pas à son ordre du jour, il n’y aura pas de paix et de sécurité durable pour Israël. On l’a dit : il n’y a pas de solution militaire. À moins de caresser le rêve fou d’évacuer la Cisjordanie de ses habitants et de mettre Gaza sous tutelle égyptienne. On ne fait la paix qu’avec son ennemi ».
« La légitimité de l’État d’Israël aux yeux du monde arabe » : «Le plus terrible pour l’avenir, c’est que cette agression israélienne est en train de détruire la légitimité de l’État d’Israël aux yeux du monde arabe et, en premier lieu, aux yeux du peuple palestinien. Cette légitimité avait été acquise grâce au processus de paix et à la reconnaissance commune de l’OLP et de l’État d’Israël. Après Gaza, il faudra reprendre ce travail de Sisyphe, mais il est fort possible que ce soit, cette fois, malheureusement, le Hamas qui devienne le nouvel interlocuteur de l’État d’Israël. Triste bilan pour ces pompiers pyromanes ! ».