La République métissée, c'est pas pour demain... En cette période d'investitures des candidats pour les prochaines municipales, les grands partis comme l'UMP et le PS risquent fort de sacrifier une nouvelle fois la diversité, le renouvellement et la parité. Où sont nos Barack Obama ?
En ce moment, dans les partis, nombre de jeunes, de femmes et de Français issus de l'immigration ou d'outre-mer vivent un véritable parcours du combattant pour être investis aux prochaines municipales.
Manifestement, les dirigants des grands partis n'ont tiré aucune leçon des dernières élections législatives : un échec aberrant en 2007 ! L’Assemblée nationale ne compte, sur 577 députés, que 107 femmes. La diversité en est absente, de même que les élus issus des classes populaires sont trop rares.
Enfin, selon le sociologue Louis Chauvel, l’Assemblée nationale de 1981 comptait un député de moins de 40 ans pour un député de plus de 60 ans, contre un pour neuf en 2007. Le PS a respecté une parité presque complète parmi ses candidats mais côté diversité, seule George Pau-Langevin a été élue dans le 20e arrdt à Paris.
La droite quant à elle n'a pas hésité à reconduire ses sortants au détriment de la parité et la diversité, et la nomination de Rachida Dati ou Rama Yade a surtout servi à dissimuler la foule des hommes blancs notables et sexagénaires qui squattent les bancs de l'Assemblée. Bref, le PS a fait un peu mieux que l'UMP mais le résultat global reste catastrophique.
Presque 25 ans après la Marche pour l'Egalité, 20 ans après la naissance de Sos-Racisme, 10 ans après les espoirs de la France Black-Blanc-Beur au Mondial 1998, et déjà deux ans après les émeutes de novembre 2005, des millions de Français issus de l'immigration ou d'outre-mer, de jeunes et moins jeunes issus des milieux populaires, de femmes, restent exclus de la représentation politique. Les partis ont compris que c'était un enjeu politique et médiatique - comme en témoigne ce numéro de l'Hebdo des socialistes qui ressemble à une mauvaise pub Benetton des années 1980. Mais de la parole aux actes, il y a un océan...
Aux prochaines élections municipales, les têtes de listes attribuées à des femmes ou à des Français issus des milieux populaires ou de l'immigration seront d'une rareté affligeante. Sur le reste des listes en général, la parité sera garantie par la loi mais la diversité risque de ne pas être au rendez-vous.
Cette situation est d'autant plus absurde que les élections municipales, scrutin de liste, permettraient de donner à ces candidats l'expérience et l'implantation locale dont on leur reproche de manquer au moment des élections législatives.
Je lance un appel aux dirigeants de la gauche, et plus particulièrement du PS : osez la diversité, la parité et le renouvellement ! Si nous voulons donner naissance à un puissant mouvement populaire et révéler une nouvelle génération politique, c'est le moment ! Nos partis recèlent des talents précieux et des parcours militants divers. La nouvelle génération côtoie les anciens. Pour se reconstruire, la gauche doit savoir puiser de nouvelles énergies dans le tissu associatif, intellectuel et syndical, et surtout reconquérir les milieux populaires, sans lesquels aucune victoire ne sera possible.
Evidemment, il existe un problème de mentalités. La discrimination raciale ou sexiste est une réalité: combien de fois des femmes ou des militants d'origine étrangère ont ils entendu "une femme fera un moins bon score qu'un homme sur cette circonscription" ou "les électeurs ne sont pas prêts" !
Souvenons-nous du malaise créé au PS par les déclarations de G.Frêche. Les partis doivent lutter drastiquement contre ces attitudes. Mais je ne crois pas en revanche en la discrimination positive ethnique.
Le vrai problème est sociologique : la politique est un sport de riche - ou de cumulard - tant il faut disposer de temps et d'argent pour assister aux réunions aux heures les plus diverses, participer aux décisions, financer ses déplacements, être disponible en pleine journée etc... Seules des mesures radicales comme l'interdiction du cumul et la création d'un statut de l'élu permettront de démocratiser davantage la vie publique.
Mais, en attendant, et pour préparer l'avenir de la gauche, le PS doit absolument relever le défi du renouvellement lors des municipales 2008 !
Dernière précision: Colin Powell, Condie Rice et Barack Obama sont loin d'être des exemples isolés aux Etats-Unis. Piyush "Bobby" Jindal, Américain d'origine indienne âgé d'à peine 36 ans, vient d'être élu - au premier tour avec 54% des voix - Gouverneur de l'Etat de Louisiane, précédemment dirigé par une femme.